Pourquoi les jeunes TC préfèrent-ils être conseiller plutôt que commercial ?

« Je souhaite être utile en apportant des conseils de qualité aux agriculteurs ». Cette phrase résonne encore en moi. Pendant toute la journée, j’ai été immergé pour le compte d’un client dans le processus de recrutement de jeunes TC lors de ce que l’on pourrait appeler des speed dating professionnels. Tous sans exception ont formulé cette ambition de devenir « conseiller », « expert ». Être vu comme un expert technique semble être le graal pour bon nombre de ces jeunes en recherche de travail dans le monde agricole.

« Si je poste une annonce pour devenir « nutritionniste » j’ai des candidatures. Par contre, si je nomme le poste technico-commercial, cela devient beaucoup plus dur ». Le directeur commercial semble lui un peu désabusé et conscient de la difficulté d’intégrer ces jeunes et de les amener à accepter la dimension commerciale de leur travail.

Je mesure alors ce que vit un jeune à qui lors du recrutement on vante la partie « conseil » du métier de TC de l’agrodistribution et qui prend conscience lors de ces premières années de l’âpreté du marché et de l’impérieuse nécessité d’intégrer que le prérequis pour délivrer du conseil…c’est de savoir le vendre !

Il s’agit d’une totale inversion des leviers de conviction qui doit se jouer à mon avis dès l’intégration des jeunes TC. Le commerce permet de faire du conseil et non l’inverse ! Et il semble clair que les parcours d’intégration des jeunes doivent prendre en compte cet élément. C’est LE moment pendant lequel on doit réussir à convaincre un jeune TC que savoir vendre et valoriser son conseil, que ce soit dans le cadre d’une offre globale (produits/services) ou d’une offre de services est VITAL. Sans cela, le conseil deviendra un dû dans la relation avec les agriculteurs et sonnera la fin de leurs ambitions de devenir un conseiller reconnu qui se donne les moyens de développer de nouvelles parts de marché et de résister à la pression concurrentielle qui fait rage sur le terrain.

Je me replonge alors dans les tours de table de nos cycles de formation commerciale initiatique : d’un côté les jeunes TC expriment de manière assez homogène cette volonté de se positionner en conseiller : « apporter des solutions aux agriculteurs », « proposer des idées nouvelles », « être le conseiller, plutôt que le commercial », « les accompagner dans leurs démarches, être proche des agriculteurs et pas seulement pour vendre » !

Et de l’autre, lorsqu’on les fait réagir sur ce qu’évoque le commerce pour eux, les réponses fusent : « de la négociation prix », « du marchandage » pour certains et « du relationnel », « installer une relation de confiance » pour d’autres…

Le marché actuel ne donne pas de temps de réflexion à ces jeunes TC. Réfléchir et se poser des questions entre « le conseil ou la vente », c’est s’exposer à sortir du jeu très rapidement. Il est impératif de les accompagner à travers des cycles d’intégration adaptés et du coaching terrain pour leur permettre d’acquérir les compétences pour VENDRE leurs offres…ce qui leur permettra ensuite de délivrer des conseils de qualité. L’inverse n’est pas vrai. Beaucoup d’entre eux considèrent que le business sera la conséquence d’un conseil délivré. Or, le terrain nous fait tous les jours toucher du doigt qu’apporter du conseil sans contrepartie, c’est accepter de banaliser ses solutions et prendre le risque de ne jamais être payé pour cela !

Pour accompagner ces jeunes TC sur ce chemin, parlons leur du marché et de l’évolution des attentes des agriculteurs, et surtout démystifions ce qu’est le « commerce » dans une relation de professionnel à professionnel. Pour être acteur de la marge des agriculteurs, il faut savoir VENDRE des solutions à forte valeur ajoutée. Assumer cette dimension, c’est un grand pas vers une posture de développeur pour un jeune TC. Alors a-t-on raison d’appeler ces postes « technico-commercial » ou « conseiller-vendeur ». L’inverse serait surement plus adapté : « commercialo-technicien » ou « vendeur-conseiller »…car au final : « Tout vaut ce qu’un client est prêt à payer » Publilius Syrus