La crise sanitaire que nous traversons met à l’épreuve nos organisations. Force est de constater qu’il s’agit d’un excellent révélateur. Nous sommes passés en quelques jours d’une surabondance d’échanges physiques sur le terrain comme en réunion, à des relations presque exclusivement à distance. Nous avons pour notre part accompagné, via des formations en visioconférence, plus de 200 TC pendant cette période. Au fil des semaines, les témoignages ont changé et les différences dans les actions engagées par les uns et les autres (à l’échelle collective de l’entreprise comme à l’échelle individuelle du TC) se sont creusées.

Les technico-commerciaux sont en train de jongler au quotidien entre des « phases d’action » afin de délivrer l’offre actuelle de leurs entreprises et des « phases d’exploration ou de réflexion », qui permettent de remettre en cause leurs façons de faire et process et de les améliorer. Il faut bien avouer que les phases d’exploration pour un TC de l’agrofourniture se font rares habituellement. Les campagnes commerciales finissent par s’empiler, s’enchaîner, et les contraintes administratives et réglementaires prennent le peu de temps restant.

Une occasion pour revoir l’approche au téléphone

Le début du confinement a donc marqué, par la force des choses, un ralentissement des « phases d’action ». Dans les premiers jours, les TC que nous avions en visio, à l’image d’un sportif de haut niveau à qui on retire l’adrénaline de la compétition, témoignaient du vide, de l’envie de « retourner en ferme pour faire notre métier comme avant ». Certains, bien sûr, continuaient les visites, les tours de plaine et rendaient compte dans un deuxième temps à l’agriculteur de leurs observations. Mais malgré tout, le manque de contacts, de richesse dans les échanges avec les agriculteurs leur coûtait.

Puis petit à petit, certains ont saisi que cette période était une occasion non pas rêvée, mais favorable pour entrer dans une phase d’exploration et challenger leurs méthodes commerciales. Par la force des choses, les process autour des démarches téléphoniques, qu’elles servent à la prise de RDV, la validation de contrats d’aliments, la vente ou même l’échange et la redécouverte d’un client, ont été les premiers à être challengés et remis à plat. Petit à petit, au travers de cas concrets, le travail de fond autour des process commerciaux se faisait. Et certains ont saisi cette opportunité !

Un agenda postconfinement bien garni

Dans une étude de Bain & Company, publiée en 2019 (« Anticiper la crise : faire du ralentissement économique une opportunité »), les périodes de récession ou du moins de forte baisse d’activité sont comparées au virage serré d’une course automobile : « Une récession peut être le meilleur moment pour dépasser ses concurrents, mais cela requiert davantage de finesse de pilotage qu’en ligne droite. Les meilleurs pilotes freinent fortement juste avant le virage, prennent un virage serré, et accélèrent autant que possible en sortie de virage. »

Au final, c’est exactement ce que nous avons observé et vécu avec les équipes de nos clients. Quand certains TC continuaient à regretter de ne pas « pouvoir aller en ferme comme avant », d’autres étaient en train de préparer la ré-accélération qui allait suivre. Ils prenaient contact avec leurs clients fidèles, partiels, voire avec des prospects, pour prendre des nouvelles, échanger, écouter. Ils imaginaient des phases de découverte par téléphone… Cela leur a permis de garnir leur agenda « postconfinement » et laisse présager d’une belle conquête de nouvelles parts de marché.

L’échange doit être profitable au TC et au client

J’ai été particulièrement marqué par cette capacité de rebond qui annonce de jolies réactions vis-à-vis des enjeux majeurs qui attendent nos organisations dans les mois à venir. Et à vrai dire, cela a également joué sur une remise en cause personnelle et collective au niveau de Réseau Motival. Nous ne cessons de dire, pour pousser les gens en prospection, que le business est d’abord une histoire de rencontre. Et nous nous sommes retrouvés complètement dépourvus au jour du confinement : pas de rencontre… pas de business… Et maintenant comment fait-on ?

Finalement, en quelques jours, après de multiples échanges entre nous et de vrais moments de vérité, nous nous sommes rappelés que la rencontre n’est réellement profitable au commerce que lorsque l’échange a un sens pour les deux, le client ou prospect et soi-même. Et, je pense que c’est ce qu’ont ressenti tous les TC qui ont décroché leur téléphone pendant le confinement pour appeler les agriculteurs, en dehors des appels reçus de untel à qui il manquait un bidon de ceci ou tel autre à qui il manquait un sac de cela !

Une nouvelle relation professionnelle se profile

Ces échanges téléphoniques portaient un sens nouveau : « Je m’intéresse à toi en tant qu’homme ou femme… en me souciant de ta santé et de ton entourage dans cette période à fort risque. » Et cette empathie personnelle a alors débouché sur une nouvelle relation professionnelle, plus ouverte, moins arrogante. Les agriculteurs ont laissé pour un temps leur posture de négociation et la relation a changé.

Il n’existe pas de solution miracle face à la période que nous vivons, mais il est possible pour chaque entreprise de bouleverser les logiques de marché dès la reprise de l’activité et pour la suite. Sur les réseaux sociaux, une formule a beaucoup circulé : « Transformer un pépin en pépites ». Certains l’ont fait et vont en récolter les fruits.

Pour illustrer cette chronique et les moments compliqués que cette période fait traverser, notamment à certains plus qu’à d’autres, je souhaite partager avec vous une citation de l’écrivain Daniel Pennac : « Quand tout est fichu, il y a encore le courage ».